Ne tirez pas sur l'oiseau moqueur COUP DE COEUR

06/03/2014 10:58

 

Dans une petite ville d'Alabama, au moment de la Grande Dépression, Atticus Finch élève seul ses deux enfants, Jem et Scout. Homme intègre et rigoureux, cet avocat est commis d'office pour défendre un Noir accusé d'avoir violé une Blanche. Ce bref résumé peut expliquer pourquoi ce livre, publié en 1960 - au cœur de la lutte pour les droits civiques -, connut un tel succès. Il ne suffit pas en revanche à comprendre comment ce roman est devenu un livre culte aux Etats-Unis et dans bien d'autres pays. C'est que, tout en situant son sujet en Alabama à une époque bien précise - les années 1930 -, Harper Lee a écrit un roman universel sur l'enfance confrontée aux préjugés, au mensonge, à la bigoterie et au mal. Racontée par Scout avec beaucoup de drôlerie, cette histoire tient du conte, de la court story américaine et du roman initiatique. Couronné par le Prix Pulitzer en 1961, Ne tirez pas sur l'oiseau moqueur s'est vendu à plus de 30 millions d'exemplaires dans le monde entier.

 

 

Mon avis :

 

Ce livre était dans ma PAL depuis l'anée dernière. Je l'avais acheté suite à ma lecture du roman "16 lunes" car il était cité à l'intérieur et qu'il m'intriguait. C'est dans le cadre d'une Lecture Commune avec Sandra Desseux que ce petit bijoux est enfin sorti de son étagère. Merci donc à Sandra pour m'avoir proposée cette LC car grâce à elle j'ai passé un pur moment de lecture et découvert un roman fantastique.

 

Tout d'abord il faut se remettre dans le contexte. Harper Lee a écrit ce roman dans les années "60" et le récit se déroule dans les années "30". Ensuite, nous sommes aux Etats-Unis, et je dois vous confier que les romans que j'ai pu lire réunissant ces deux caractéristiques m'ont rarement déçu. Celui-ci ne déroge pas à la règle et c'est un énorme COUP DE COEUR et ce pour plusieurs raisons que je vais tenter de vous décrire.

 

La première est qu'Harper Lee a choisi de nous raconter cette histoire au travers des yeux d'une petite fille de 9 ans environ. Le récit court sur trois année et nous la voyons donc grandir. Son regard sur le monde évolue. Jean Louise Finch, alias Scout, possède un sacré tempéramment et est une petite fille plutôt bagarreuse. On pourrait la qualifier de garçon manqué. Elle est élevée par son père car sa mère est décédée alors qu'elle n'avait que 2 ans, ainsi que par Calpurnia, la gouvernante Noire de la maison. Scout est inséparable de son frère Jem un peu plus âgé qu'elle. L'auteure nous embrouille un peu l'esprit au début du roman car je ne savais pas vraiment qui elle avait désigné pour nous raconter cette fabuleuse histoire. J'ai dans un premier temp pensé que c'était un homme adulte, puis un petit garçon, avant que le terme "soeur" n'apparaisse, et que je comprenne que le narrateur était en réalité cette fameuse Scout. Un joli tour de passe-passe d'Harper Lee. J'aime quans les auteurs nous font réfléchir un peu, nous obligeant parfois à revenir quelques pages en arrière pour nous assurer de ce qu'on croit être vrai ou faux.

Grâce à ce choix de narration, l'auteur nous permet de vivre cette histoire d'une manière beaucoup moins dramatique qu'elle n'aurait pu l'être. En effet, l'innocence de Scout, son regard neuf, élève le récit à un niveau supérieur au lieu de le déservir. Car oui ce roman parle de racisme, mais il en parle d'une manière fraîche, dénuée de jugement. Cela n'aurait pu être possible si l'auteur avait fait parlé un adulte, déjà conditionné par des opinions. Ici, Scout est en plein apprentissage de la vie et de ses injustices, mais elle voit tout cela d'une manière presque humoristique, avec des yeux d'enfants, posant des questions justes à des moments peu opportuns pour les adultes. J'ai d'ailleurs parfois été surprise par sa maturité. Harper Lee a fait de Scout une enfant très douée, très pertinente. Elle grandit et ouvre doucement les yeux sur ceux qui l'entourent, sans pour autant en être aigrie. Sa fraîcheur est préservée malgré les évènements bouleversants qu'elle traverse.

Tout cela fait de "Ne tirez pas sur l'oiseau moqueur", un roman initiatique fort. Toute la première partie nous présente la vie dans cette petite ville de Maycomb où la religion est très prégnante, et où les ragots vont bon train. On suit Scout à l'école et dans ses frasques l'été avec Jem et Dill son futur mari (il l'a demandé en mariage le premier été et a promi de l'épouser plus tard). Le rythme suit celui des enfants. Je me suis parfois demandée quand allait surgir cette fameuse histoire décrite dans le 4ème de couverture, à savoir que le père de Scout, Atticus Finch, devrait défendre un Noir accusé d'avoir violé une Blanche. Il y a des prémices dans la première partie, où on évoque cette affaire, mais rien de vraiment concret car l'audience n'a pas encore eut lieu. Ainsi, au travers de toute cette première partie, Harper Lee s'attèle à nous faire connaître les habitants de la ville, afin de mieux comprendre les réactions des uns et des autres dans la seconde partie du roman. Les manies des uns et des autres sont passées à la loupe d'une petite fille très attachante.

 

La seconde raison qui m'a fait tant apprécier ce roman, est le sujet traité en toile de fond : le racisme. Cet aspect est clairement abordé dans la seconde partie et je me suis dit que l'auteur avait merveilleusement bien plantée le décor. On sait à qui et à quoi nous avons à faire. On connait l'issue du procès, mais tout l'intérêt réside dans la manière dont les choses sont traitées. Quel homme que cet Atticus! Un père de cet acabit ne pouvait qu'élever des enfants éclairés et notamment une petite Scout si lucide. Jem n'est pas en reste et il aborde l'adolescence doucement sous le regard d'incompréhension de sa petite soeur. Atticus lui,  est éloquent et j'ai dévoré le passage se déroulant au tribunal. C'est un pur moment de grâce qui m'a parfois tiré des larmes aux yeux. La plaidoirie est sublime. Ce genre d'histoire me touche, éveille chez moi des désirs de devenir avocate même !  Atticus Finch est un personnage qui selon l'auteur ressemble à son père, ou tout du moins, elle s'en est grandement inspirée (info à la fin du roman). Ce sont des hommes comme lui qui ont fait avancer les choses en matière de tolérance ou plutôt d'égalité devant la justice. J'aime ces histoires de fiction qui s'ancrent dans le réel. Harper Lee a écrit un roman intemporel car le racisme nous est malheureusement contemporain.

 

adaptation cinématographique de 1962

 

Enfin, j'ai aimé tout le mystère qui régnait autour de Boo Radley, le voisin terré chez lui et que personne n'a vu depuis trente ans. On est dans les peurs de l'enfance, dans les histoires de fantômes. J'ai adoré la manière dont les enfants s'imaginaient des récits rocambolesques. L'éducation que donne Atticus Finch à ses enfants est pour moi la meilleure qui soit. Il ne leur cache rien. Il dit les choses telles qu'elles sont, avec des mots qui leur permettent de comprendre à leur niveau ce qu'est le respect d'autrui peu importe sa couleur, ses choix de vie. Boo Radley est une énigme, une sorte de croque-mitaine... Scout aura-t-elle l'opportunité de le rencontrer?

 

Les personnages secondaires sont tout aussi intéressant. Il y a Miss Maudie, Calpurnia, Dill, Tante Alexandra et bien d'autres. C'est une petite fresque sociale que nous décrit ici Harper Lee.

 

J'ai fini ce roman avec un brin de nostalgie. J'aurai bien continué à suivre Scout et ainsi être la spectatrice de son évolution. Quelle femme elle deviendra ! Une grande femme c'est certain. Enfin si Tante Alexandra ne la transforme pas en Dame ! Mais vu le sale caractère de la petite, je doute qu'elle soit si manipulable...

 

Un petit mot sur le style littéraire pour dire que la lecture est agréable, que j'ai bien aimé la reproduction des accents parfois, et que la franchise de Scout transparait dans cette plume directe.

 

Je vous invite grandement à franchir le cap en courant acheter ou emprunter ce roman incroyable sur l'Amérique des années "30". Vous y rencontrerez le pire comme le meilleur et surtout une petite fille fantastique. Quel dommage que l'auteur ait vécu dans l'ombre ensuite et n'ait jamais rien publié d'autres. Le roman a obtenu le prix Pulitzer en 1961 et est étudié dans de nombreux lycée aux Etats-Unis.

 

Edition: Le Livre de Poche

Auteure: Harper Lee

Pages : 434

Prix: 6,60€

 

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